Synthèse sur la loi Sapin 2 et les alertes, à jour de la loi du 21 mars 2022 et du décret du 3 octobre 2022

La loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 a été modifiée en profondeur par la loi du 21 mars 2022 et le décret du 3 octobre 2022 qui renforcent la protection des lanceurs d’alertes : nouvelle définition du lanceur d'alerte, accès étendus aux dispositifs, protections renforcées,... 

Le lanceur d’alertes est en effet considéré par le législateur comme intervenant aussi bien dans l’intérêt général que dans l’intérêt des entreprises privées et des entités publiques elles-mêmes. Avertir d’une infraction, ou un manquement, prévenir un danger, c’est protéger la sécurité des salariés et agents, leur intégrité physique et morale, assurer que l’entreprise, administration ou entité publique ne subisse pas les conséquences des agissements anormaux de certains de ses dirigeants ou agents.

A l’inverse, si l’entreprise, administration ou entité publique ne sait pas qu’un manquement est commis, elle ne peut pas prendre l’initiative d’y mettre fin, et s’expose, ainsi que ses dirigeants ou élus personnellement, à des risques d’accidents humains, sociaux, industriels, environnementaux, ainsi qu’à des poursuites, des conflits, des procédures.

Définition du lanceur d'alertes et ouverture des dispositifs

La loi du 21 mars 2022 donne une nouvelle définition élargie du lanceur d'alertes :

« Un lanceur d’alerte est une personne physique qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement. Lorsque les informations n’ont pas été obtenues dans le cadre des activités professionnelles mentionnées au I de l’article 8, le lanceur d’alerte doit en avoir eu personnellement connaissance ».

Le lanceur d'alerte n'est pas nécessairement un salarié de l'entreprise. Ce peut être un tiers, sous-traitant, fournisseur,... D'ailleurs, les entités publiques ou privées doivent ouvrir largement leur dispositif d'alertes.

L'obligation de déployer un dispositif d'alertes

L’article 8 de la loi Sapin 2 révisée rend obligatoire la mise en place de systèmes d'alertes dans les administrations, entités publiques et entreprises privées, selon trois canaux distincts, selon la taille de l'entité, sous le contrôle de la nouvelle Agence française anti-corruption :

  • 1er cas– pour les entités employant entre 50 et 249 salariés, la mise en place une procédure interne de recueil et de traitement des signalements, après consultation des instances de dialogue social est obligatoire. Toutefois, désormais ces entités peuvent convenir de mettre en commun leurs procédures de recueillement et de traitement des signalements.
  • 2ème cas– pour les entités de plus de 250 salariés, elles sont tenues d’établir une procédure interne propre à leur entité de recueil et de traitement des signalements, après consultation des instances de dialogue social.
  • 3ème cas– pour les groupes de sociétés, il est possible de centraliser la procédure de recueil et de traitement des signalements à plusieurs ou à l’ensemble des sociétés du groupe.

L'ouverture des dispositifs

Les entités publiques et privées concernées doivent ouvrir leur dispositif :

"1° Aux membres du personnel, aux personnes dont la relation de travail s’est terminée, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette relation, et aux personnes qui se sont portées candidates à un emploi au sein de l’entité concernée, lorsque les informations ont été obtenues dans le cadre de cette candidature ;

2° Aux actionnaires, aux associés et aux titulaires de droits de vote au sein de l’assemblée générale de l’entité ;

3° Aux membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance ;

4° Aux collaborateurs extérieurs et occasionnels ;

5° Aux cocontractants de l’entité concernée, à leurs sous-traitants ou, lorsqu’il s’agit de personnes morales, aux membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de ces cocontractants et sous-traitants, ainsi qu’aux membres de leur personnel. »

Les 3 canaux de signalement

Le lanceur d’alerte peut choisir entre :

  • un signalement interne c’est-à-dire au sein de l'entreprise (sur le site d’ethicorp ou auprès d’un supérieur hiérarchique) pour des informations « portant sur des faits qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans l’entité concernée » et si le lanceur d’alerte estime que cette voie permettra de « remédier efficacement » à la violation et qu’il ne s’expose pas à un « risque de représailles »
  • un signalement externe, auprès d’autorités (Défenseur des droits, autorités judiciaires, ordres professionnels, etc.) devant présenter des « garanties d’indépendance et d’impartialité »

il peut aussi procéder à une divulgation publique :

  • Après signalement externe si aucune mesure « appropriée » n’a été prise (absence d’accusé de réception dans un délai de 7 jours ou absence de traitement dans un délai de 3 mois après l’accusé de réception) ;
  • En cas de danger grave ou imminent / pour « des informations obtenues dans le cadre de ses activités professionnelles en cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général »
  • Si la saisine d’une autorité provoque un risque de représailles / ne permettrait pas de remédier efficacement.
  • Exception : atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationales.

La procédure de recueil et de traitement des signalements, qu'elle soit interne ou externe, doit garantir l’indépendance et impartialité des personnes ou services chargés de sa mise en œuvre.

Avec ethicorp, l'intervention d'avocats, qui ont un devoir d'indépendance, est une garantie de cette impartialité.

Défenseur des Droits

Désormais, le rôle du Défenseur des droits a été étendu il est désormais chargé de l'accompagnement des lanceurs d'alerte et des facilitateurs. A ce titre il pourra :

  • recevoir directement les signalements et les traiter ;
  • si les signalements n’entrent pas dans son périmètre de compétence, orienter le lanceur d’alerte vers la personne compétente ;
  • « certifier » au moyen d'un avis la qualité de lanceur d'alerte d'une personne, soit au titre de la protection générale des lanceurs d'alerte, soit au titre d'un régime sectoriel de protection.

L'interdiction des mesures de représailles

Les lanceurs d'alertes ne peuvent pas faire l'objet de mesure de représailles ni de menaces ou de tentatives de ces mesures. La loi dresse une liste des faits susceptibles d'être considérés comme une mesure de représailles, on retrouve notamment :

  • la suspension, mise à pied, licenciement ou mesures équivalentes ;
  • transfert de fonctions, changement de lieu de travail, réduction de salaire, modification des horaires de travail ;
  • évaluation de performance ou attestation de travail négative ;
  • coercition, intimidation, harcèlement ou ostracisme ;
  • non-renouvellement ou résiliation anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée ou d'un contrat temporaire.

Ces protections s'étendent aux collègues et proches du lanceur d'alertes, à l'entreprise qui l'emploie (cas d'un lanceur d'alerte salarié d'un prestataire externe) et aux facilitateurs : « toute personne physique ou toute personne morale de droit privé à but non lucratif qui aide un lanceur d’alerte à effectuer un signalement ou une divulgation ».

Les mesures de rétorsion relèvent par ailleurs désormais du délit de discrimination.

Enfin, désormais l’article 10-1 de la loi Sapin II prévoit des causes d'exonération de la responsabilité civile et d'irresponsabilité pénale telle que consacrée à l'article 122-9 du Code pénal au bénéfice du lanceur d’alerte (violation du secret professionnel, vol de documents, avec la protection des complices également).

Confidentialité

La loi exige une confidentialité absolue, protégeant l'identité du lanceur d'alertes, celle de la personne visée par l'alerte et de toutes les personnes mentionnées, et les faits objets de l'alerte, sous peine de 2 ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende.

ethicorp assure précisément cette confidentialité complète :

  • Le lanceur d’alerte dépose son alerte sur un site hautement sécurisé,
  • L’alerte est reçue et traitée par des avocats, profession soumise au secret professionnel le plus strict qui existe.
  • S'il la connaît, ethicorp ne communique pas l'identité du lanceur d'alerte à l'entreprise.